jeudi 31 mars 2011

Les vraies raisons de la guerre en Lybie

1-Premier satellite Africain RASCOM 1


C’est la Libye de Kadhafi qui offre à toute l’Afrique sa première vraie révolution des temps modernes : assurer la couverture universelle du continent pour la téléphonie, la télévision, la radiodiffusion et de multiples autres applications telles que la télémédecine et l’enseignement à distance ; pour la première fois, une connexion à bas coût devient disponible sur tout le continent, jusque dans les zones rurales grâce au système par pont radio WMAX. L’histoire démarre en 1992 lorsque 45 pays africains créent la société RASCOM pour disposer d’un satellite africain et faire chuter les coûts de communication sur le continent.


Téléphoner de et vers l’Afrique est alors le tarif le plus cher au monde, parce qu’il y avait un impôt de 500 millions de dollars que l’Europe encaissait par an sur les conversations téléphoniques même à l’intérieur du même pays africain, pour le transit des voix sur les satellites européens comme Intelsat. Un satellite africain coûtait juste 400 millions de dollars payable une seule fois et ne plus payer les 500 millions de location par an. Quel banquier ne financerait pas un tel projet ? Mais l’équation la plus difficile à résoudre était : comment l’esclave peut-il s’affranchir de l’exploitation servile de son maître en sollicitant l’aide de ce dernier pour y parvenir ? Ainsi, la Banque Mondiale, le FMI, les USA, l’Union Européenne ont fait miroiter inutilement ces pays pendant 14 ans.


C’est en 2006 que Kadhafi met fin au supplice de l’inutile mendicité aux prétendus bienfaiteurs occidentaux pratiquant des prêts à un taux usuraire; le guide Libyen a ainsi mis sur la table 300 millions de dollars, La Banque Africaine de Développement a mis 50 millions, la Banque Ouest Africaine de Développement, 27 millions et c’est ainsi que l’Afrique a depuis le 26 décembre 2007 le tout premier satellite de communication de son histoire. Dans la foulée, la Chine et la Russie s’y sont mises, cette fois en cédant leur technologie et ont permis le lancement de nouveaux satellites, Sud-Africain, Nigérian, Angolais, Algérien et même un deuxième satellite africain est lancé en juillet 2010. Et on attend pour 2020, le tout premier satellite technologiquement 100% africain et construit sur le sol africain, notamment en Algérie.


Ce satellite est prévu pour concurrencer les meilleurs du monde, mais à un coût 10 fois inférieur, un vrai défi. Voilà comment un simple geste symbolique de 300 petits millions peut changer la vie de tout un continent. La Libye de Kadhafi a fait perdre à l’Occident, pas seulement 500 millions de dollars par an mais les milliards de dollars de dettes et d’intérêts que cette même dette permettait de générer à l’infini et de façon exponentielle, contribuant ainsi à entretenir le système occulte pour dépouiller l’Afrique. 2. Fond Monétaire Africain, Banque Centrale Africaine, Banque Africaine des Investissements Les 30 milliards de dollars saisis par M. Obama appartiennent à la Banque Centrale Libyenne et prévu pour la contribution libyenne à la finalisation de la fédération africaine à travers 3 projets phare :

- la Banque Africaine d’Investissement à Syrte en Libye, - la création dès ce 2011 du Fond Monétaire Africain avec un capital de 42 milliards de dollars avec Yaoundé pour siège, - la Banque Centrale Africaine avec le siège à Abuja au Nigeria dont la première émission de la monnaie africaine signera la fin du Franc CFA grâce auquel Paris a la main mise sur certains pays africains depuis 50 ans. On comprend dès lors et encore une fois la rage de Paris contre Kadhafi. Le Fond Monétaire Africain doit remplacer en tout et pour tout les activités sur le sol africain du Fond Monétaire International qui avec seulement 25 milliards de dollars de capital a pu mettre à genoux tout un continent avec des privatisations discutables, comme le fait d’obliger les pays africains à passer d’un monopole publique vers un monopole privé.


Ce sont les mêmes pays occidentaux qui ont frappés à la porte pour être eux aussi membres du Fond Monétaire africain et c’est à l’unanimité que le 16-17 décembre 2010 à Yaoundé les Africains ont repoussé cette convoitise, instituant que seuls les pays africains seront membres de ce FMA. Il est donc évident qu’après la Libye la coalition occidentale déclarera sa prochaine guerre à l’Algérie, parce qu’en plus des ses ressources énergétiques énormes, ce pays a une réserve monétaire de 150 milliards d’Euros. Ce qui devient la convoitise de tous les pays qui bombardent la Libye et qui ont tous quelque chose en commun, ils sont tous financièrement en quasi faillite, les USA à eux seuls ont 14.000 Milliards de dollars de dettes, La France, la Grande Bretagne et l’Italie ont chacun environ 2.000 milliards de dettes publiques alors que les 46 pays d’Afrique Noire ont au total moins de 400 milliards de dollars de dettes publiques.


Créer des fausses guerres en Afrique dans l’espoir de trouver de l’oxygène pour continuer leur apnée économique qui ne fait que s’empirer ne fera qu’enfoncer les Occidentaux dans leur déclin qui a pris son envol en 1884, lors de la fameuse Conférence de Berlin. Car comme l’avait prédit l’économiste Américain Adams Smith en 1865, dans son soutient à Abraham Lincoln pour l’abolition de l’esclavage, «l’économie de tout pays qui pratique l’esclavage des noirs est en train d’amorcer une descente vers l’enfer qui sera rude le jour où les autres nations vont se réveiller »



3- Unions régionales comme frein à la création des Etats Unis d'Afrique


Pour déstabiliser et détruire l’union Africaine qui va dangereusement (pour l’Occident) vers les Etats-Unis d’Afrique avec la main de maître de Kadhafi, l’Union Européenne a d’abord tenté sans y parvenir la carte de la création de l’UPM (Union Pour la Méditerranée) Il fallait à tout prix couper l’Afrique du Nord du reste de l’Afrique en mettant en avant les mêmes thèses racistes du 18-19ème siècle selon lesquelles les populations africaines d’origine Arabes seraient plus évoluées, plus civilisées que le reste du continent. Cela a échoué parce que Kadhafi a refusé d’y aller. Il a compris très vite le jeu à partir du moment où on parlait de la Méditerranée en associant quelques pays africains sans en informer l’Union Africaine, mais en y invitant tous les 27 pays de l’Union Européenne.


L’UPM sans le principal moteur de la fédération africaine était foirée avant même de commencer, un mort-né avec Sarkozy comme Président et Mubarack, le vice-président. Ce que Alain Juppé tente de relancer, tout en misant sur la chute de Kadhafi, bien sur. Ce que les dirigeants Africains ne comprennent pas est que tant que ce sera l’Union Européennes à financer l’Union Africaine, on sera toujours au point de départ, car dans ces conditions, il n’y aura pas d’effective indépendance.


C’est dans le même sens que l’Union Européenne a encouragé et financé les regroupements régionaux en Afrique. Il était évident que la CEDEAO qui a une Ambassade à Bruxelles et qui tire l’essentiel de son financement de l’UE, est un obstacle majeur contre la fédération africaine. C’est ce que Lincoln avait combattu dans la guerre de sécession aux Etats-Unis, parce qu’à partir du moment où un groupe de pays se retrouvent autour d’une organisation politique régionale, cela ne peut que fragiliser l’organe central.


C’est ce que l’Europe voulait et c’est ce que les Africains n’ont pas compris en créant coup sur coup, la COMESA, l’UDEAC, la SADC et le Grand Maghreb qui n’a jamais fonctionné encore une fois grâce à Kadhafi qui lui l’avait très bien compris.


4-Kadhafi, l'Africain qui a permis de laver l'humiliation de l'Apartheid


Kadhafi est dans le coeur de presque tous les Africains comme un homme très généreux et humaniste pour son soutien désintéressé a la bataille contre le régime raciste d’Afrique du Sud. Si Kadhafi avait été un homme égoïste, rien ne l’obligeait à attirer sur lui les foudres des occidentaux pour soutenir financièrement et militairement l’ANC dans sa bataille contre l’apartheid. C’est pour cela que à peine libéré de ses 27 ans de prisons, Mandela décide d’aller rompre l’embargo des Nations Unis contre la Libye le 23 Octobre 1997. A cause de cet embargo même aérien, depuis 5 longues années aucun avion ne pouvait atterrir en Libye.


Pour y arriver, Il fallait prendre un avion pour la Tunisie ; arriver à Djerba et continuer en voiture pendant 5 heures pour Ben Gardane, passer la frontière et remonter en 3 heures de route par le désert jusqu’à Tripoli. Ou alors, passer par Malte et faire la traversée de nuit, sur des bateaux mal entretenus jusqu’à la côte libyenne. Un calvaire pour tout un peuple, juste pour punir un seul homme. Mandela décida de rompre cette injustice et répondant a l’ex Président Américain Bill Clinton, qui avait jugé cette visite «malvenue», il s’insurgea : «Aucun Etat ne peut s'arroger le rôle de gendarme du monde, et aucun Etat ne peut dicter aux autres ce qu'ils doivent faire ».


Il ajouta : « ceux-là qui hier étaient les amis de nos ennemis, ont aujourd’hui le toupet de me proposer de ne pas visiter mon frère Kadhafi, ils nous conseillent d’être ingrats et d’oublier nos amis d’hier ». En effet, pour l’Occident, les racistes d’Afrique du Sud étaient leurs frères qu’il fallait protéger. C’est pour cela que tous les membres de l’Anc étaient considérés des dangereux terroristes, y compris Nelson Mandela. Il faudra attendre le 2 Juillet 2008, pour que le Congrès Américain vote une loi pour rayer le nom de Nelson Mandela et de ses camarades de l’ANC de cette liste noire, pas parce qu’ils ont compris la bêtise d’une telle liste, mais parce qu’on voulait faire un geste pour les 90 ans de Nelson Mandela.


Si les Occidentaux sont aujourd’hui repentis de leur soutient d’hier aux ennemis de Mandela et sont vraiment sincères lorsqu’on lui donnent des noms de rue et de places, comment continuer à faire la guerre à celui qui a permis la victoire de Mandela et son peuple, Kadhafi ?


B- Ceux qui veulent exporter la démocratie sont ils des démocrates?


Et si la Libye de Kadhafi était plus démocratique que les USA, la France, la Grande Bretagne et tous ceux qui font la guerre pour exporter la démocratie en Libye ? Le 19 Mars 2003, le Président Georges Bush lance les bombes sur la tête des Iraquiens avec le prétexte d’y exporter la démocratie. Le 19 Mars 2011, c’est-à-dire 8 ans plus tard et jour pour jour, c’est le Président Français qui lance ses bombes sur la tête des Libyens avec le même prétexte de leur offrir la démocratie.


Monsieur Obama, Prix Nobel de la Paix 2009 et président des Etat Unis d’Amérique, pour justifier qu’il procède à un déferlement de missiles Cruise de ses sous-marins sur la tête des Libyens a dit que c’était pour chasser le dictateur Kadhafi du pouvoir et y instaurer la démocratie. La question que tout être humain doté de la moindre capacité intellectuel de jugement et d’appréciation ne peut s’empêcher de se poser est : ces pays comme la France, l’Angleterre, les USA, l’Italie, la Norvège, le Danemark, la Pologne dont la légitimité pour aller bombarder les Libyens se base sur le seul fait de s’être autoproclamés « pays démocratiques » sont-ils réellement démocratiques ? Si oui, sont-ils plus démocratiques que la Libye de Kadhafi ? La réponse, sans équivoque est NON, pour la simple et bonne raison que la démocratie n’existe pas.


Ce n’est pas moi qui l’affirme, mais celui-là même dont la ville natale, Genève abrite l’essentiel du commandement des Nations Unies. Il s’agit bien entendu de Jean-Jacques Rousseau né à Genève en 1712 qui affirme dans le chapitre IV du Livre III de son très célèbre « Contrat Social » que : « il n'a jamais existé de véritable démocratie, et il n'en existera jamais». Pour qu’un état soit véritablement démocratique Rousseau pose 4 conditions selon lesquelles la Libye de Kadhafi est même de loin plus démocratique que les Etats-Unis d’Amérique, la France et tous les autres qui prétendent lui exporter la démocratie à savoir :


1- Dimension de l’Etat : plus un état est grand, moins il peut être démocratique


Pour Rousseau l’Etat doit être très petit pour que le peuple soit facile à rassembler et que chaque citoyen puisse aisément connaître tous les autres. Avant donc de faire voter les gens, il faut s’assurer que chacun connaisse tous les autres sans quoi voter pour voter est un acte dénué de tout fondement démocratique, c’est un simulacre de démocratie pour élire un dictateur. La structure de l’organisation de l’Etat Libyen se fonde sur une base tribale qui regroupe par définition le peuple en de petites entités.


Le sentiment démocratique est plus présent dans une tribu, dans un village que dans une grande Nation, parce que le fait que tout le monde se connaisse et que la vie tourne autour des mêmes points communs apporte une sorte d’autorégulation, d’autocensure même pour peser à chaque instant, la réaction ou la contre-réaction des autres membres pour ou contre les opinions qu’on peut avoir.


Sous cet angle, c’est la Lybie qui répond le mieux aux exigences de Rousseau, ce qu’on ne peut pas dire de même pour les Etats-Unis d’Amérique, la France ou la Grande Bretagne, des sociétés fortement urbanisées où la majorité des voisins ne se disent même pas bonjour et donc ne se connaissent pas, même vivant cote-à-cote pendant 20 ans. Dans ces pays, on est passé directement à l’étape suivante : « le vote » qu’on a malignement sanctifié afin de faire oublier que ce vote est inutile à partir du moment où je m’exprime sur l’avenir d’une nation sans en connaitre ses membres.


On est ainsi arrivé jusqu’à la bêtise du vote des citoyens vivant à l’étranger. Se connaitre et se parler est la condition essentielle de la communication pour le débat démocratique qui précède toute élection.


2- Il faut la simplicité des mœurs et des comportements pour éviter que l’on passe l’essentiel du temps à parler de justice, de tribunal pour trouver des solutions aux multitudes querelles d’intérêts divers qu’une société trop complexe fait naitre naturellement. Les Occidentaux se dé finissement comme des pays civilisés, donc aux mœurs complexes et la Libye comme pays dit primitif, c’est-à-dire aux meurs simples. Sous cet angle, encore une fois, c’est la Libye qui répondrait mieux aux critères démocratiques de Rousseau que tous ceux qui prétendent lui donner des leçons de démocratie.


Dans une société complexe, les trop nombreux conflits sont résolus par la loi du plus fort, puisque celui qui est riche évite la prison parce qu’il peut se permettre un meilleur avocat et surtout, orienter l’appareil répressif de l’état contre celui qui vole une banane dans un supermarché, plutôt que le délinquant financier qui fait crouler une banque. Dans une ville comme New York où 75% de la population est blanche, 80% des postes de cadres sont occupés par des Blancs et ils ne sont que 20% des personnes en prison.


3- L’égalité dans les rangs et dans les fortunes.


Il suffit de voir le classement FORBES 2010 pour voir quels sont les noms des personnes les plus riches de chacun des pays qui jette la bombe sur la tête des Libyens et voir la différence avec le salaire le plus bas dans chacun des pays et faire de même pour la Libye pour comprendre qu’en matière de redistribution de la richesse du pays, c’est à la Libye d’exporter son savoir faire à ceux qui la combattent et non le contraire. Même sous cet angle, selon Rousseau, la Libye serait plus démocratique que ceux qui veulent pompeusement lui exporter la prétendue démocratie. Aux Etats-Unis 5% de la population possèdent 60% de la richesse nationale. C’est le pays le plus déséquilibré, le plus inégal du monde.


4- PAS DE LUXE


Pour Rousseau pour qu’il y ait la démocratie dans un pays, il ne faut pas qu’il y ait de luxe parce que selon lui, le luxe rend nécessaire la richesse et cette dernière devient la vertu, l’objectif à atteindre à tout prix et non le bonheur du peuple, « le luxe corrompt à la fois le riche et le pauvre, l'un par la possession, l'autre par la convoitise ; il vend la patrie à la mollesse, à la vanité ; il ôte à l'Etat tous ses citoyens pour les asservir les uns aux autres, et tous à l'opinion ». Ya-t-il plus de luxe en France ou en Libye ? Ce rapport d’asservissement des employés qui sont poussés jusqu’au suicide les employés mêmes des entreprises publiques ou semi-publique, pour des raisons de rentabilité et donc de possession de luxe d’une des parties est-il plus criant en Libye ou en Occident ?


Le sociologue Américain C. Wright Mills a décrit en 1956 la démocratie américaine comme « la dictature des élites ». Selon Mills, les Etats-Unis d’Amérique ne sont pas une démocratie parce qu’en définitive, c’est l’argent qui y parle dans les élections et non le peuple. Le résultat de chaque élection y est l’expression de la voix de l’argent et non la voix du peuple. Après Bush-père et Bush-fils, pour les primaires républicaines de 2012, on parle déjà de Bush-benjamin. En plus, si le pouvoir politique se base sur la bureaucratie, Max Weber fait remarquer qu’il y a 43 millions de fonctionnaires et militaires aux Etats-Unis qui commandent effectivement le pays, mais qui n’ont été votés par personne et qui ne répondent pas directement au peuple de leurs activités.


Une seule personne (un riche) est donc votée mais le vrai pouvoir sur le terrain est tenue par une seule caste de riches qui ne résulte purement et simplement que de nominations comme les ambassadeurs, les généraux de l’armée etc... Combien de personnes dans les pays autoproclamés « démocratiques » savent qu’au Pérou la constitution interdit un deuxième mandat consécutif au président de la république sortant ? Combien de personnes savent qu’au Guatemala, non seulement le président sortant ne doit plus jamais se présenter comme candidat à cette fonction, mais qu’en plus à aucun degré de parenté, aucun membre de sa famille ne pourra plus prétendre à cette fonction ?


Combien savent que le Rwanda est le pays qui intègre politiquement le mieux les femmes au monde avec 49% de parlementaires femmes ? Combien savent que dans le classement de la CIA 2007, sur 10 pays les mieux gérés au monde, 4 sont Africains ? Avec la palme d’or à la Guinée équatoriale dont la dette publique ne représente que 1,14% de son PIB. La guerre civile, les révoltes, les rebellions sont les ingrédients d’un début de démocratie soutient Rousseau. Parce que la démocratie n’est pas une fin, mais un processus permanent pour réaffirmer les droits naturels des humains que dans tous les pays du monde (sans exception) une poignée d’hommes et de femmes, confisquant le pouvoir du peuple, l’oriente pour se maintenir aux affaires.


On trouve ici et là des formes de castes qui usurpent le mot « démocratie » qui doit être cet idéal vers lequel tendre et non un label à s’approprier ou un refrain à vanter parce qu’on est juste capable de crier plus fort que les autres.


Si un pays est calme comme la France ou les Etats-Unis, c’est-à-dire sans aucune révolte, pour Rousseau cela veut tout simplement dire que le système dictatorial est suffisamment répressif pour empêcher toute tentative de rébellion. Si les Libyens se révoltent, ce n’est pas une mauvaise chose. C’est prétendre que les peuples acceptent stoïquement le système qui les opprime partout dans le monde sans réagir qui est très mauvais.


Et Rousseau de conclure : « Malo periculosam libertatem quam quietum servitium -traduction : S'il y avait un peuple de dieux, il se gouvernerait démocratiquement. Un gouvernement si parfait ne convient pas à des hommes ». Dire qu’on tue les Libyens pour leur bien est un leurre.


C- Quelles leçons pour l'Afrique?


Après 500 ans de relations de dominateur et de dominé avec l’Occident, il est dès lors prouvé que nous n’avons pas les mêmes critères pour définir le bon et le méchant. Nous avons des intérêts profondément divergents. Comment ne pas déplorer le Oui de 3 pays africains au sud du Sahara, Nigeria, Afrique du Sud et Gabon pour la résolution 1973 inaugurant la nouvelle forme de colonisation baptisée « protection des peuples », validant la théorie raciste que les Européens véhiculent depuis le 18ème siècle selon laquelle l’Afrique du Nord n’a rien à partager avec l’Afrique Subsaharienne, l’Afrique du nord serait ainsi plus évoluée, plus cultivée et plus civilisée que le reste de l’Afrique. Tout se passe comme si la Tunisie, l’Egypte, la Libye, l’Algérie ne faisaient pas partie de l’Afrique.


Même les Nations Unies semblent ignorer la légitimité de l’Union Africaine sur ses états membres. L’objectif est d’isoler les pays d’Afrique subsaharienne afin de mieux les fragiliser et les tenir sous contrôle. En effet, dans le capital du nouveau Fond Monétaire Africain (FMA), l’Algérie avec 16 milliards de dollars et la Libye avec 10 milliards de dollars contribuent à eux tous seuls pour près de 62% du capital qui est de 42 milliards de Dollars. Le premier pays d’Afrique subsaharienne et les plus peuplés, le Nigeria suivi de l’Afrique du Sud arrivent très loin derrière avec 3 milliards de dollars chacun.


C’est très inquiétant de constater que pour la première fois de l’histoire des Nations Unies, on a déclaré la guerre à un peuple sans avoir exploré au préalable la moindre piste pacifique pour solutionner le problème. L’Afrique a-t-elle encore sa place dans une telle organisation ? Le Nigeria et l’Afrique du Sud sont disposés à voter OUI à tout ce que l’Occident demande, parce qu’ils croient naïvement aux promesses des uns et des autres de leur donner une place de membre permanent au Conseil de Sécurité avec le même droit de veto. Ils oublient tous les deux que la France n’a aucun pouvoir de leur attribuer le moindre poste. Si elle l’avait, il y a belle lurette que Mitterrand l’aurait faite pour l’Allemagne de Helmut Kohl. La reforme des Nations Unies n’est pas à l’ordre du jour.


La seule manière de compter, est la méthode chinoise : tous les 50 pays africains doivent quitter les Nations Unies. Et s’ils doivent y retourner un jour, ne le faire que s’ils ont obtenu ce qu’ils demandent depuis longtemps, un poste pour toute la fédération africaine, sinon rien. Cette méthode de la non-violence est la seule arme de justice dont disposent les pauvres et les faibles que nous sommes. Nous devons tout simplement quitter les Nations Unies, car cette organisation de par sa configuration, de par sa hiérarchie est aux services des plus forts. Nous devons quitter les Nations Unies afin de marquer notre réprobation de cette conception du monde basée uniquement sur l’écrasement du plus faible.


Tout au moins ils seront libres de continuer de le faire, mais pas avec notre signature, pas en rappelant que nous sommes d’accord alors qu’ils savent très bien qu’ils ne nous ont jamais interrogés. Et même quand nous avons donné notre propre point de vue, comme la rencontre de samedi 19/3 à Nouakchott avec la déclaration sur la contrariété à l’action militaire, ceci a été passé tout simplement sous silence pour aller accomplir le forfait de bombarder le peuple africain.


Ce qui arrive aujourd’hui est le scénario déjà vu auparavant avec la Chine. Aujourd’hui, on reconnaît le gouvernement Ouattara, on reconnaît le gouvernement des insurgés en Libye. C’est ce qui s’est passé à la fin de la deuxième guerre mondiale avec la Chine. La soit disante communauté internationale avait choisi Taiwan comme unique représentant du peuple Chinois en lieu de place de la Chine de Mao. Il faudra attendre 26 ans, c’est-à-dire le 25 octobre 1971 avec la résolution 2758 que tous les Africains devraient lire, pour mettre fin à la bêtise humaine. La Chine est admise, sauf qu’elle a prétendu et obtenue d’être membre permanent avec doit de veto, si non elle n’entre pas. Cette exigence satisfaite et la résolution d’admission entrée en vigueur, il faudra attendre un an pour que le 29 septembre 1972, le Ministre Chinois des Affaires Etrangères donne sa réponse avec une lettre au Secrétaire Général des Nations Unies pas pour dire Oui ou


Merci, mais pour faire des mises au point, en garantie de sa dignité et de sa respectabilité. Qu’est-ce que l’Afrique espère obtenir des Nations Unies sans poser un acte fort pour se faire respecter ? On a vu en Cote d’Ivoire un fonctionnaire des Nations Unies se considérer au dessus d’une institution constitutionnelle de ce pays. Nous sommes entrés dans cette organisation en acceptant d’être des serfs et croire que nous serons invités à table pour manger avec les autres dans les plats que nous avons lavés est tout simplement crédule, pire, stupide.


Quand l’UA reconnaît la victoire de Ouattara sans même tenir compte des conclusions contraires de ses propres observateurs envoyés sur le terrain, juste pour faire plaisir à nos anciens maîtres, comment peut-on nous respecter ? Lorsque le président Sud-Africain Zuma déclare que Ouattara n’a pas gagné les élections et change à 180° après un tour à Paris, on peut se demander ce que valent ces dirigeants qui représentent et parlent au nom de 1 milliard d’Africains. La force et la vraie liberté de l’Afrique viendront de sa capacité à poser des actes réfléchis et en assumer les conséquences. La dignité et la respectabilité ont un prix. Sommes-nous disposés à le payer ? Si non, notre place reste à la cuisine, aux toilettes pour garantir le confort des autres. Genève le 28/03/2011 Jean-Paul Pougala (*) Jean-Paul Pougala est un écrivain d’origine camerounaise, directeur de l’Institut d’Etudes Géostratégiques et professeur de sociologie à l’Université de la Diplomatie de Genève en Suisse.

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samedi 19 mars 2011

La jeunesse africaine perdue entre destin, survie et rêve : Cas du Cameroun

Par Louis-Marie Kakdeu

Nous écrivons cet article en réaction à l’opinion écrasante qui propage l’idée selon laquelle l’avenir des jeunes africains se trouve dans le « voyage [en Occident] ». De nos jours, le jeune qui n’a pas « voyagé » est déprécié dans les milieux socioprofessionnels. Pour cette raison, des familles entières se mobilisent pour cotiser de l’argent afin d’envoyer un enfant « devant [en Occident] ». Cette conception critiquable de la réussite sociale est de nature à inquiéter en ce sens qu’elle s’installe déjà confortablement dans les discours politiques en Afrique comme en Occident. En marge du Conseil de l’Europe le vendredi 17 décembre 2010, le Président Français Nicolas Sarkozy lance un « ultimatum » au Président Gbagbo en ces termes : « Laurent Gbagbo et son épouse ont leur DESTIN ENTRE LEURS MAINS. (..) Ils seront nommément sur la liste des sanctions [interdiction de voyager en Europe et gel des avoirs] ».

Cet ultimatum nous intéresse parce qu’il implicite qu’aux yeux des Occidentaux, le grand « destin » qu’un Africain puisse avoir, est d’entrer en Europe et d’en disposer des biens de telle façon que si l’on empêche à un dissident d’y mettre les pieds, alors ce dernier n’aurait plus son destin « entre ses mains ».
Cette déclaration du Président Français est une autre grosse controverse sur l’histoire du peuple Noir après sa sortie de Dakar qui faisait état de ce que les Africains n’étaient pas encore entrés dans l’histoire.
A notre modeste avis, l’avenir des jeunes africains se joue autour de cette problématique de la révolution historique. Dans cet article, nous nous demandons si les jeunes seront prêts à accueillir cet événement qui arrive à grands galops sur le continent. Nous diagnostiquons, du point de vue de la manipulation psychique, deux grands groupes : les jeunes qui sont victimes du lavage de cerveau et ceux qui gardent leur discernement. Nous nous intéressons plus à ceux qui ont perdu leur esprit critique. Pour mieux rendre compte de cette situation, nous utilisons substantiellement comme données ou matériaux de base, l’implicite qui se dégage de l’imaginaire populaire des protagonistes au Cameroun. Nous ne traitons pas ici des « causes de surface » dites endogènes ou exogènes à savoir : la mauvaise gouvernance, la corruption, les détournements de deniers publics, les injustices, etc. Nous essayons de nous saisir des causes sous-jacentes (angl. « underlying realities »).

La clairvoyance pour la majorité des jeunes consiste à « voyager pour réaliser son destin [rêve] ». Dans notre société contemporaine, on confond « destin », « survie » et « rêve ». Selon cette logique de confusion, Dieu nous aurait créé Africains par erreur puisqu’il aurait dû nous créer « Occidentaux » afin que nous puissions accomplir notre destin. Ou encore, il nous a créé Africains d’abord pour que nous devenions Occidentaux par la suite afin d’accomplir notre « destin ». Ainsi, on entend les gens dire : « Mon gars, il faut suivre son destin [à Mbeng] ». On observe que la prière dominante dans les églises dites « africaines » en Occident est celle de demander à Dieu d’opérer « le miracle » afin que les fidèles issus de « l’immigration clandestine » soient « régularisés [obtiennent un titre de séjour valable ou un passeport] ». La logique défendue est de chercher d’abord « une situation en Occident [survie] » avant de rentrer plus tard en Afrique pour sauver les «morts-vivants [ceux qui, dans les milieux populaires, estiment qu’ils sont des survivants ou mieux, des cadavres réanimés]». En tout cas, cette conception de la vie en société a des répercussions sur les plans éducatif, économique et politique.

Sur le plan éducatif, le cadre légal est pourtant louable au Cameroun. Selon la loi n°98/004 du 14 avril 1998 portant orientation de l’éducation au Cameroun, l’État veille à l’article 5 entre autres à « la formation de citoyens enracinés dans leur culture, mais ouverts au monde et respectueux de l'intérêt général et du bien commun » et au « développement de la créativité, du sens de l'initiative et de l'esprit d'entreprise ». La mise en œuvre de cette loi est discutable en supposant qu’elle n’est pas devenue caduque avec la disparition du ministère de l’éducation nationale au début des années 2000. L’impact de la politique publique actuelle sur les jeunes est négatif en ce sens que ces derniers perdent leur identité nationale au profit de celle de l’Occident. Un jeune, au niveau du baccalauréat général, n’a aucune compétence susceptible de lui permettre de transformer son environnement.
Il est formé pour aimer « la belle France » et tourner en dérision « le Cameroun pourri ». Comment envisage-t-on l’avenir du Cameroun quand les jeunes dans leur majorité ont le déni de leur pays ? Au sein de la diaspora, l’essentiel des jeunes « allés se chercher [survie] » changent à jamais de nom ou de nationalité, « watchisent [veulent être plus Blanc que les Blancs eux-mêmes] » et perdent l’envie de rentrer pour travailler à l’émergence de leur pays. Au pays, les jeunes dans leur majorité ne rêvent que de partir à l’étranger. Tous, sinon chacun, a son « projet ».

Des pays comme le Canada, les États-Unis ou la France pratiquent sous une forme ou sous une autre, « l’immigration choisie ». En clair, on choisit les plus valeureux qui aideront à poursuivre le développement de l’Occident. Pendant plus de quatre siècles de traite négrière, c’est ce même procédé qui consistait à prendre les Africains valeureux pour aller construire l’Amérique et plus tard, l’Europe. Et qui restera travailler pour le développement du Cameroun en particulier et de l’Afrique en général ? Toutes les railleries qui accompagnent ceux des jeunes de la diaspora qui ambitionnent de retourner au pays, montrent que l’ampleur du mal est profonde.

Sur le plan économique, on constate que les économies agricoles comme celle du Cameroun génèrent des citoyens affamés. En réalité, on constate que les riches de facto sont devenus les pauvres de jure. Pendant une promenade dans une rue en Europe, on peut être choqué lorsqu’on se fait interpellé par une association humanitaire qui dit : « Bonjour, en donnant un euro, vous pouvez contribuer à nourrir une famille en Afrique ». Au parjure !
Comment se fait-il que ceux qui à 65% pratiquent une activité agricole se retrouvent en train de dépendre des miettes que l’on collecte dans les rues de l’Occident dans un « élan de cœur » appelé « Action contre la faim » ? La réponse se trouve en partie dans le système de fonctionnement actuel de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) qui dispose des règles déloyales et impérialistes permettant d’exploiter les pays du Sud au profit de ceux du Nord.


Comme dans le système bancaire actuel, on observe que ce sont les économies que font les pauvres qui permettent de faire vivre les riches. Si vraiment les membres de la Communauté internationale qui sont aussi membres de l’OMC voulaient mettre fin à la misère dans les pays du Sud, alors ils rendraient le commerce plus équitable. Le 14/12/2011 au Conseil général, le Directeur général de l’OMC, Pascal Lamy, appelait les négociateurs commerciaux à « sortir de leur zone de confort pour parvenir à un accord » et s’engager quant au fond sur une base « sans préjudice ». En attendant que ce rêve soit réalité, il est à constater que ces accords constituent un lourd fardeau pour la jeunesse africaine. Une autre partie de la réponse se trouve dans la politique monétaire qui lie la France et ses anciennes colonies.

En effet, les Africains de la zone du Franc CFA font l’agriculture pour avoir des « devises » et non pour « se nourrir ». Les 50% de ces devises restent en France et le reste ne suffit pas pour garantir l’autosatisfaction alimentaire en Afrique. Il appartient aux jeunes agriculteurs de rompre avec cette spirale infernale en cultivant prioritairement ce qui entre dans les habitudes alimentaires locales et de ne songer à vendre que l’excédent de leurs productions.

Malheureusement, on observe dans le mouvement d’exode rural accentué que les jeunes propriétaires terriens et héritiers des adultes qui approvisionnaient jadis le marché local, abandonnent leurs plantations souvent plantées pour aller pratiquer l’activité de moto-taxi en ville. Ces jeunes sont victimes de la manipulation ou du lavage de cerveau au sens d’Esquerre (2002) ou de Laurens (2003). Un rapport de pouvoir dominant de la Banque Mondiale en particulier les contrôle psychiquement et fait état de ce qu’ils resteront pauvres s’ils ne produisent pas « deux dollars [en espèce] par jour ».

Ainsi, c’est tout logiquement et en adéquation avec la tendance dominante que les jeunes abandonnent les richesses de leurs parents en campagne pour aller en ville gagner l’équivalent de « deux dollars » en vivant dans la promiscuité ou la précarité totale. Ces jeunes sont victimes d'une force quasiment irrésistible qui les pousse à faire ou à penser des choses non propices pour eux, une force qui finalement conduit à leur perte.
Par le fonctionnement sous-jacent de notre société, les impérialistes ont fait une intrusion dans la vie de nos jeunes et causent un véritable viol de la conscience ou de leur volonté. Ce ne sont plus eux qui expriment leur volonté ou qui agissent, mais c'est la volonté des impérialistes qui est entrée en eux et qui agit à travers eux (sentiment de possession). Ce phénomène bien décrit par les spécialistes de la manipulation est d’actualité et mérite une attention particulière. On peut comprendre que les impérialistes soient satisfaits de l’évolution de nos sociétés « à civiliser » et militent passionnément pour la démocratie en Afrique parce que ce système leur permet de s’exprimer à travers les Africains dont ils possèdent la conscience. Toutefois, la jeunesse devrait pouvoir consommer la démocratie avec modération c’est-à-dire sans oublier que son inconvénient est la dictature de la majorité, surtout dans notre contexte africain où la majorité est encore peu éclairée.

Sur le plan politique, la jeunesse Camerounaise est désœuvrée. Le gouvernement ne propose aucune prospective crédible et susceptible de permettre de faire face au lessivage culturel et stratégique des jeunes. Pendant que les politiques s’égarent « du 1er au 31 » dans un cercle vicieux de campagnes électorales ou de batailles fratricides pour le contrôle de la «mangeoire suprême [appareil de l’État]» dans une logique de « pousses-toi, je m’assois aussi », les activités de lavage de cerveau des jeunes se poursuivent.

Les outils sont entre autres :

- La télévision et la radio : l’incapacité chronique de la CRTV à faire des productions locales est une fatalité pour l’identité camerounaise dans ce siècle de la communication. L’État du Cameroun est plus préoccupé dans son « budget de la consommation » par le renforcement des armes militaires que par le renforcement des armes de la communication. En bref, le Cameroun est forcé par une « supra-autorité malsaine [impérialiste]» de garantir le marché de consommation des produits militaires qui fondent l’économie occidentale au lieu d’accentuer son budget, de façon souveraine, sur la formation de son opinion publique comme c’est le cas partout ailleurs dans ce siècle.
En clair, on n’arrivera pas à développer les gens qui ne veulent pas de ce développement à moins que ce soit la copie d’un mode de développement qui vient d’ailleurs (rêves ou fantasmes de l’étranger). Il est à penser qu’en l’état, le gouvernement en place perdra la guerre de la communication qui permettra de contrôler le Pouvoir dans les années à venir. En attendant, on constate que les jeunes sont des fans du « câble [chaînes étrangères] ». Même dans les villages à peine électrifiés, on suit mieux l’actualité occidentale que l’actualité nationale. Les jeunes suivent des chaînes dont la ligne éditoriale est de ne s’intéresser qu’aux faits divers en Afrique. Ainsi, ces jeunes subissent au sein de leur propre pays, la perversion à travers « les idées reçues » (Courade, 2006) qui vont dans le sens de ce que : « l’Afrique est pauvre », « c’est un continent des misères », « il n’y a pas de démocratie », « il n’y a que des coups d’État », « l’Afrique, ça ne vaut pas la peine », « la famine touche les enfants », etc.

Les jeunes Africains subissent cette politique éditoriale qui vise à faire table rase des activités d’impérialisme et de dresser l’opinion occidentale contre les immigrés ou « envahisseurs » Africains. On entend : « ils sont encombrants », « ils viennent prendre notre travail », « ils sont une charge pour le contribuable », etc. Le jeune occidental est comme ce fils de trafiquant ou de détourneur de deniers publics qui sait que son père est riche et ignore ce que ce dernier fait pour être riche.

- Le visa pour « voyager » et les titres de séjour pour vivre sur place. Le jeune qui veut aller étudier ou travailler en Occident doit remplir les critères de l’immigration choisie. En gros, il doit être excellent sur le plan scolaire et accepter de mourir culturellement pour renaître dans le moule occidental. C’est la culture du « monde civilisé ». Cette activité de lavage de cerveau et d’assimilation culturelle est dramatique. On amène nos jeunes à renier leurs origines voire leur existence. Le spectacle est désolant sur la place occidentale : Quand vous parlez de l’actualité camerounaise à un jeune, vous avez la chance une fois sur deux d’entendre : « Non ! Non ! Merci ! Je ne suis plus ça ! [avec un air de déni] ». Ces clichés que les jeunes développent sur leur propre pays sont inquiétants sur le plan stratégique. Cela renseigne sur l’échec du management stratégique de la jeunesse Camerounaise en particulier et Africaine en général.


- Les bourses d’études. Le gouvernement camerounais n’offre plus de façon autonome les bourses d’études à ses citoyens ; ce sont les Occidentaux qui le font en majorité à sa place. Mais, ces derniers ne prennent légitimement en charge un jeune Africain que s’ils trouvent en lui, un potentiel pilier pour défendre leurs intérêts. Par exemple, de façon stratégique, les Occidentaux qui ont peur de l’émergence de la Chine accueillent des jeunes Chinois dans l’espoir que ces derniers seront les futurs leaders de la Chine. Et de façon stratégique, le gouvernement Chinois travaille de son côté à éviter l’accomplissement du lavage de cerveau de ses citoyens qui étudient en Occident. Au contraire, les étudiants chinois sont, en Occident, un maillon fort du renseignement ou de la veille stratégique qui permet l’émergence de leur pays.

La fatalité que nous relevons ici vient de ce que les jeunes leaders Camerounais en particulier et Africains en général sont formés au goût des impérialistes. En termes d’enjeux de société et de prospective, le Cameroun sera occidental dans l’avenir. Il faut dire que les Dragons de l’Asie (la Corée du Sud, Hong Kong, Singapour, Taïwan, République populaire de Chine) inquiètent l’Occident parce qu’ils ont pris le chemin inverse pour se développer. Une des stratégies payantes a été le développement de ce que l’on a appelé les « Home-Made Specialists [Cadres formés pour la cause de leurs pays d’origine] ». En bref, afin d’autonomiser ses futurs cadres, les Dragons avaient eux-mêmes supporté les frais de formation de leurs jeunes à l’étranger. A travers une politique migratoire réussie, ils les ont fait des propositions de travail alléchantes dans leurs pays d’origine à l’issu de leurs formations respectives.

Et par conséquent, cette génération de HMS a su développer l’Asie mieux que l’Occident. Ce rêve est loin d’être une réalité au Cameroun. Après sa formation en Occident, le jeune diplômé ne sait pas ce qu’il retourne faire au pays et il se retrouve en train de faire le jeu de l’Occident pour « survivre ». Avec un Président qui est au pouvoir depuis 28 ans, le jeune « prisonnier du désespoir » se retrouve en train de devoir choisir entre « destin », « survie » et « rêve ». Il finit par « foncer » sur l’axe de la dénonciation de la dictature et des violations des droits de l’homme pour avoir une aura favorable susceptible de lui permettre de vivre en Occident.

On entend le Président Biya dire que la jeunesse est le fer de lance de la Nation ou mieux, le « Cameroun de demain ». D’accord ! Mais, projetons-nous en l’an 2035. Que se passerait-il ? On sait qu’en 2004, le Président Biya avait donné rendez-vous à ses «Assassins» dans 20 ans. Par conséquent, on peut envisager que la « Génération privilégiée » qui dirige le pays depuis 1960 sera passée en 2024. Et ensuite ? On peut être au moins sûr qu’à ce moment-là, la qualité de vie se serait considérablement dégradée en Occident avec entre autres le vieillissement de la population et l’augmentation de la précarité du travail et des retraites.

L’excédent de la population misérable occidentale aurait envahi l’Afrique. Les jeunes africains seront-ils prêts à en tirer profit ? Pas sûr car, ils abandonnent leurs richesses et s’enfuient vers l’extérieur pendant que les Occidentaux pauvres s’installent ! De nos jours et de façon géostratégique, les étrangers ont déjà acheté toutes les belles vues sur la plage ainsi que tout ce qui pourrait être beau en Afrique. Au nom de la démocratie et du respect des droits de l’homme, les jeunes africains risquent d’être des spectateurs de la révolution historique sur leur propre continent. Actuellement, la montée de l’extrême droite nourrit le sentiment d’hostilité en Europe : on est en train de chasser les jeunes Africains de l’Occident alors que les européens viendront vivre à l’aise en Afrique demain.

Dans sa déclaration de Dakar, le Président Sarkozy pouvait aussi avoir voulu impliquer que les Africains ne savent pas encore faire de la prospective ; ils ne savent pas encore lire stratégiquement de quel côté tournera l’histoire dans 50 ans. Ils vivent au jour le jour au lieu de prévoir ! Ne dit-on pas que gouverner c’est prévoir ?

En bref, on observe que les jeunes Africains abandonnent leurs richesses en campagne pour aller vivre dans la précarité en ville (exode rural). De même, ils abandonnent leurs richesses en Afrique pour aller vivre dans la précarité en Occident même s’ils ne le reconnaissent jamais à leur retour en Afrique par peur de railleries diverses. C’est purement et simplement un problème de complexe. La vie est « finie » en Occident et les enjeux seront importants en Afrique dans le futur. C’est cet enjeu qui se joue déjà en Côte d’Ivoire avec un conflit postélectoral qui vise tout sauf la promotion de la démocratie. La vie est devenue impossible au Portugal par exemple et allez voir maintenant en Angola comment les Portugais immigrent par milliers et profitent de la splendeur de ce pays divisé pendant que les jeunes angolais eux-mêmes « cherchent à aller au Portugal [n’ont pas encore pris conscience de la révolution historique qui s’opère]». Il ne s’agit pas de rejeter l’Occident mais, d’être stratégiquement prêts à accueillir la révolution sur le continent.

Il s’agit d’être prêt à traiter d’égal à égal. Aucune prospective n’est convaincante à ce sujet. Le ministère de la jeunesse s’occupe prioritairement de l’organisation des défilés et des autres événements de ce genre qui voient la présence du Chef de l’Etat. Dans les faits, le mot « jeunesse » est abusif dans ce ministère. Il s’agit scientifiquement du ministère de l’animation sociale qui s’occupe des activités non formelle (activités extrascolaires y compris l’éducation des adultes). La prospective est rattachée au ministère de l’économie (ancien ministère du plan). Mais, la polémique suscitée par les résultats jugés non convaincants du recensement général de la population de 2005 renseigne sur la qualité du travail qu’on fait dans ce ministère.

Les jeunes qui réussissent de nos jours sont ceux qui se prennent eux-mêmes en charge. Le gouvernement est surpris comme tout le monde par leurs succès. Nos « héros nationaux » du football par exemple sont des anciens laissés-pour-compte que le hasard a conduits au podium. Nous sommes encore dans la logique de nos aïeux selon laquelle l’enfant est une richesse : « On accouche en abondance dans l’espoir qu’au moins un seul réussira quel que soit le cas ». La priorité de nos jours au Cameroun est d’investir dans le prospective car, le management stratégique du pays est défectueux. Le Cameroun ne peut pas par exemple débourser 500 milliards de F CFA comme en 2009 pour importer les aliments (donner du travail aux étrangers) alors que le taux du chômage atteint les 30% à l’interne (refus du travail aux contribuables Camerounais).


Dans l’agriculture au sens large (y compris élevage et pêche), une étude que nous avons menée entre 2003 et 2008 dans les banlieues des métropoles Douala et Yaoundé (rayon de 70 km), fait état de ce que les paysans ont besoin d’un appui élémentaire pour tripler leurs productions et permettre ainsi au Cameroun d’être à l’abris des « émeutes de la faim » et de toutes les actes de barbarie qui ont suivis en 2008. Leurs besoins élémentaires d’ordre technique et matériel pouvaient être chiffrés entre 300 mille et 1 million de francs CFA.

Par conséquent, en trouvant des astuces pour contourner les règles de l’OMC comme le gouvernement a su en trouver pour acheter l’albatros, on peut mettre simplement 10 milliards de francs CFA à disposition dans le cadre d’une coopérative pour subventionner entre 10 et 30 mille GICs et créer entre 30 et 70 mille emplois directs dans l’agriculture et ce, en 6 mois. Le gouvernement en a les moyens mais, paradoxalement, il donne du travail aux étrangers pendant qu’à l’étranger, on chasse les Camerounais.

Il est incompréhensible qu’au moment où le gouvernement dépense les 1/6 du budget national pour importer les aliments, il réprime à sang les activistes de l’ADDIC par exemple qui faisaient état de ce qu’un apport de 4 milliards de Francs CFA seulement suffisait pour produire le maïs de façon à garantir la sécurité alimentaire des Camerounais et de protéger le secteur agricole. Cela fait état de ce qu’il y a encore des décisions stratégiques à prendre à ce niveau. Une fois de plus, le discours du Président Biya à l’ouverture du Comice agropastoral national d’Ebolowa le 17 janvier 2011 a fait table rase de l’opérationnalité de la mise en œuvre d’une telle réforme agraire qu’il appelle « nouvelle politique agricole ». Comme il le dit lui-même dans ses discours depuis 2006, il faut passer des discours aux actes : « Avons-nous le droit d’hésiter ? », « chaque jour compte. Alors, assez tergiversé. Entrons dans la mêlée » pour une jeunesse plus prospère!

Source :
http://www.lepost.fr/article/2011/03/11/2431898_la-jeunesse-africaine-perdue-entre-destin-survie-et-reve-cas-du-cameroun.html

« Génération sacrifiée » Vs « Génération privilégiée » : la logique de deux lobbies qui s’affrontent au Cameroun

Par Louise-Marie Kakdeu

Problème politique

La Génération qui s’estime « sacrifiée » veut renverser la Génération dite « privilégiée » qui dirige le pays depuis des décennies et qui se donne des privilèges insolents encore appelés dans l’imaginaire populaire « signes extérieurs de richesse ».

Coalition des acteurs

Au Cameroun, on parle de « Génération privilégiée » en référence aux « privilèges » qu’avaient les jeunes de la génération postindépendance et qui n’existent plus de nos jours. Il s’agit des facilités que l’on pouvait avoir dans le cursus éducatif, l’emploi, la qualité de vie, etc. Par opposition, on parle aussi de « Génération sacrifiée » en référence aux jeunes nés sous le Renouveau dans les années 1980 et qui connaissent des problèmes d’identité et d’intégration socioprofessionnelle.
Ainsi, on relève à foison dans l’imaginaire populaire des accusations des jeunes ou de leurs parents allant dans le sens de ce que : « l’école d’aujourd’hui n’est plus l’école », « Paul Biya a coupé la bourse aux étudiants », « le travail est devenu njindja [rare] », « tu boulot, tu boulot mais, où sont les dos [le travail n’est pas rémunéré à sa juste valeur] », « le dehors est gâté [les temps ont changé] », « on ne ya plus sa tête sur ce pays [on est désillusionné par les réalités du pays] », « on est là mon gars, on va faire comment ? [on a marre de subir les difficultés du quotidien] », « le Cameroun me fatigue [décourage inlassablement] », « le Cameroun est pourri [invivable] », « on va aller se chercher [il n’y a plus d’espoir au Cameroun] », etc. De telles représentations de la réalité de la vie sociale au Cameroun font appel à la recherche d’un bouc-émissaire. Et comme le montrent les sociologues, le tort est prioritairement rejeté sur le pouvoir en place.

Cela nous permet d’avoir la deuxième acception du mot « sacrifié ». En effet, la spécificité du Cameroun sur le plan politico-administratif (interaction entre les acteurs ou « politics ») est l’abondance des gens de la « Génération Biya [plus de 70 ans] » dans le cercle du pouvoir. On entend dire : « ce sont les gens qui sont là jusqu’à la mort ». Cela révèle l’existence des états d’âme qui se sentent écartés, voire même « marginalisés » de la gestion de l’Etat. Par conséquent, les lésés se disent « sacrifiés » pourtant, ils sont la plaque tournante de la vie active. On estime que les jeunes de moins de 35 ans constituent environ 75% de la population active en Afrique centrale. Cette polémique trouve sa justification chez Machiavel ou encore plus loin, dans la société antique d’Athènes où les adversaires de la démocratie conçue comme Loi de la majorité faisaient état de ce que cette ordre des choses est contre-nature car, disaient-ils, « c’est toujours la minorité qui dirige la majorité » dans les faits.

D’autre part, ceux qui sont à la « mangeoire suprême [appareil de l’Etat] » et qui sont accusés d’avoir « sacrifiés » les jeunes du Renouveau, estiment plutôt que les jeunes « d’aujourd’hui » appartiennent à une « Génération privilégiée » en référence au fait que les bienfaits de la libéralisation en général et de la liberté d’expression en particulier qui sont l’œuvre du « Père du Renouveau [Paul Biya] », n’existait pas à l’époque du parti unique dirigé de main de fer par le Président Ahidjo.
De plus, ils estiment que les bienfaits du développement technologique dans la facilitation de la vie sociale sont un « privilège » que les jeunes qui vivaient « autrefois dans la barbarie » d’après les paroles de leur hymne nationale, n’ont pas connu. Dans l’imaginaire des membres de la « mangeoire », c’est souvent récurrent d’entendre : « aujourd’hui, tu peux tourner sur un boulon au mûr et l’eau coule, est-ce que nous avions ça ? », « ils ont les routes et ils se plaignent ! », « tu prends ton téléphone et tu appelles quelqu’un ; nous, on devait parcourir des kilomètres à pied pour transmettre nos messages ! », « aujourd’hui, vous avez l’école à côté, bref, tout est facile pour vous ! », etc.


Fondement biaisé

Ce débat est fondé sur une base de comparaison biaisée parce que, tel que présenté, il n’est pas faisable d’isoler la variable « jeune » compte tenu de l’évolution du contexte. De même, ceux qui, dans l’évaluation de la politique de la jeunesse sous le Renouveau postulent que le Président Paul Biya est la cause du désœuvrement des jeunes de nos jours, ne peuvent pas s’appuyer sur les standards d’évaluation reconnus car, la variable « Paul Biya [mauvaise gouvernance et corruption] » n’est pas la seule variable explicative.
Il convient donc, dans un modèle de causalité plus fiable, d’étendre la réflexion sur les racines du problème. En d’autres termes, il n’est pas juste, comme le postulent les défenseurs acharnés de l’alternance au pouvoir, de faire penser que le remplacement de la variable « Président Biya » par « Président X » sera la solution plausible aux problèmes de la jeunesse. Tout en respectant le point de vue de ces personnes, nous écrivons cet article en réaction à une partie de l’opinion qui soutient la navigation à vue.

Hypothèse d’intervention

Avec les moyens intellectuels disponibles au Cameroun de nos jours, il est possible de déclencher le changement sociopolitique en minimisant les risques de débordement et en évitant de détruire les acquis à l’ivoirienne. Il est raisonnablement inacceptable pour ceux qui s’estiment « sacrifiés » de fonder leur espoir politique sur le leurre qu’après Biya, le « hasard » conduira un ange au pouvoir. Le pragmatisme nous commande aujourd’hui d’abandonner l’opportunisme politique pour focaliser la réflexion sur les vraies solutions d’ordre opérationnel susceptibles d’être profitables à long terme.

Ceux qui revendiquent leur appartenance aux raisonnements pragmatiques, doivent être sensibles aux fonds de la pensée de Charles Sanders Pierce, fondateur du pragmatisme, qui pose quatre piliers susceptibles de permettre de bâtir une réflexion crédible sur le fonctionnement sous-jacent de la société : il s’agit de l’autorité, de la ténacité, de l’a priori et de l’empirisme. En gros, la logique de la gestion de la société n’est pas objective et équitable. En effet, si l’on prend une question comme celle de la justice sociale, Pierce nous incite à envisager que ce qui est juste, n’est juste que par rapport à l’autorité de ceux qui le disent, à la ténacité qu’ils utilisent pour défendre leur point de vue, à la force des a priori rendant favorable leur vision et à la place de leur vision dans les connaissances empiriques sur le sujet.
Cela permet de mieux comprendre un certain nombre d’assertions qui existent et qui renseignent à suffisance sur le fonctionnement sous-jacent de notre société : « tant que Yaoundé respire, le Cameroun vit », « Yaoundé est notre village », « Bamenda a eu SON université, Maroua a eu SON université, l’Est revendique aussi SON université, le Sud n’a pas eu SON université, etc. », « la politique aux politiciens et l’école aux écoliers », « le Cameroun c’est le Cameroun », etc.

En clair, si nous voulons résoudre le problème de notre jeunesse, nous devons, dans une espèce de démarche générativiste, admettre l’existence d’un archi-trait sous-jacent ou d’un facteur majeur qui chapote tous les autres facteurs mineurs qu’on déplore en surface au niveau national. Nous ne parlons pas ici en termes de facteurs endogène et exogène. Nous indexons la « mafia » souterraine qui conditionne la mise en œuvre officielle des politiques publiques.
Il est légitime de penser que le problème du Cameroun en particulier et de l’Afrique Noire en général, n’est pas celui du manque du savoir ou du savoir-faire. Peut-être, il s’agit d’un manque du savoir-être. Mais, à toute évidence, en ce jour, force est de constater qu’on sait exactement ce qui ne marche pas et les solutions appropriées. Le problème réel réside dans le manque de volonté opérationnelle de mettre en œuvre les vraies solutions. On prescrit expressément le faux médicament au malade. Ou mieux, on lui donne des solutions palliatives au lieu de le guérir définitivement. Pourquoi cette « mafia [méchanceté] » ?

Une hypothèse plausible est de reconnaître que nous vivons aujourd’hui dans un monde acquis à la cause d’une « Autorité malsaine » qui défend avec une Ténacité déloyale ses intérêts partout où cela est nécessaire en diffusant à profusion des « Idées reçues » sur le Tiers-monde et en s’appuyant sur un Empirisme qu’il fabrique lui-même (« L’Afrique n’est pas encore entrée dans l’Histoire [et par conséquent, il faut lui tenir la main] », « ce qui est bon pour la France est bon pour l’Afrique [les Africains sont des citoyens gros-bébés qu’il faut nourrir au biberon] », etc.). Il est pensable que les « Autorités nationales » échouent de résister à « l’Autorité internationale » malsaine ou écrasante et que les premiers finissent par mettre sur pied les mêmes types de fonctionnement malsains au sein de leur pays.
Nous sommes dans un cercle vicieux préoccupant. Si l’on remplace le Président Biya par un Président X, ce dernier sera obligé de se soumettre à « l’Autorité internationale » malsaine pour régner. Kakdeu (2010c) qui a étudié le discours des putschistes en Afrique Noire Francophone révèle que ceux des putschistes qui ont pu régner sont aussi ceux qui ont finalement arrimé leurs discours aux normes des « idées reçues » promues par l’Autorité internationale malgré le fait que leur motivation de base était de lutter contre le chao social. Ils disaient : « Les militaires veillent à la défense de l’intégrité du territoire », « Nous avons pris en main nos responsabilités ». Et ils finissent par dire : « Nous voulons instaurer la démocratie [réseau de la Françafrique] », « nous respectons la volonté de la communauté internationale ».

Les deux derniers putschistes en date à savoir Sékouba Konaté de la Guinée et Salou Djibo du Niger faisaient ressortir dans leurs discours, la soumission aux « pressions » de la Communauté internationale d’une part et de leurs peuples d’autre part. Et quand on sait que les intérêts des membres de la Communauté internationale qui sont encore ceux qui pratiquent l’impérialisme, sont drastiquement opposés aux intérêts des populations africaines, on comprend pourquoi, même les militaires qui « prennent leurs responsabilités », n’arrivent pas à mettre fin aux chaos sociaux vécus en Afrique. Dans les faits, quand ils prennent le pouvoir, ils finissent toujours par « entrer dans la danse » à défaut de se faire assassiner ou renverser. Ceci nous inspire que la politique de la jeunesse doit être stratégique et minutieusement orientée vers le développement de leur pays.

Une autre hypothèse plausible est de penser que la solution viendra de la rue comme en Tunisie ou en Égypte. Mais, la rue peut renverser même le meilleur Président du monde à cause de la traversée d’une mauvaise conjoncture. La vraie et meilleure solution reste la consolidation des institutions souveraines. Il ne faut jamais oublier qu’une grande démocratie est faite d’institutions fortes. Les Amoureux du changement doivent être sensibles au fait que la stratégie « d’ici et maintenant » a conduit nos nationalistes à rater l’équation des indépendances. Il faut en tirer des leçons. Les institutions sont fortes lorsque toutes les parties prenantes les respectent indépendamment de l’intervention de la communauté internationale.
Pour que les institutions soient fortes, il faut que l’opposition par exemple joue sa partition. Une certaine opinion publique est toujours portée maladroitement à critiquer Paul Biya sans réclamer le bilan des 20 ans d’opposition de Ni John Fru Ndi et compagnie. Un Président peut-il réussir la construction d’un pays sans forces alternatives ? Les oppositions camerounaises ont été beaucoup plus opportunistes, affamés et soucieux de leurs ventres dans une logique de « pousses-toi et je m’assois aussi ».

L’actualité au Cameroun qui fait état du lancement du recrutement de 25000 jeunes dans la fonction publique révèle une fois de plus une Opposition à court d’idées face à un Pouvoir qui sombre dans l’hésitation. Il faut relever par exemple que la mise en œuvre de cette mesure populiste par le gouvernement Biya nécessite la mobilisation d’une enveloppe budgétaire d’environ 50 milliards F CFA par an. Cela est curieux au moment où le budget de la République du Cameroun en 2011 a été revu à la baisse. En supposant qu’il ne s’agit pas d’une farce politique ou que les résultats n’attendront pas cinq ans pour être connus comme ceux du recensement général de la population de 2005, on peut relever au moins deux choses :

1- Le gouvernement du Cameroun dispose d’une caisse publique occulte et non déclarée qui consolide les accusations de mauvaise gouvernance tant décriées. La jeunesse de la génération « sacrifiée » peut légitimement continuer à faire des revendications afin de puiser dans ces fonds occultes non-comptabilisés.

2- Le gouvernement du Cameroun ne résout pas les problèmes de la jeunesse qui s’estime « sacrifiée » depuis 28 ans par pur manque de volonté politique car, en un an, le Président Biya aurait fait ce qu’il n’a pas fait en 28 ans. En clair, il n’est pas sûr qu’il ait recruté 25 000 personnes dans la fonction publique depuis son accession au pouvoir en 1982.

Dans un Etat qui se réclame démocratique, le gouvernement Biya devrait donner des explications sur le mode de financement de cette mesure exceptionnelle. Sinon, la « Génération sacrifiée » aurait raison de penser que son régime l’aurait « sacrifié » parce qu’il avait intérêt à fonctionner avec une jeunesse ignorante et non susceptible de faire foule. Si le régime n’opte pas pour la transparence, il aurait tort car, comme dans le monde arabe, les intellectuels de la « Génération sacrifiée » ne fonctionneront pas comme ceux de la « Génération privilégiée » qui sont spécialistes de la rédaction des « motions de soutien » insolites.

Dans tous les cas, on peut dire que cette mesure exceptionnelle est déjà une victoire symbolique remportée par la « Génération sacrifiée » car, jusqu’ici, l’entrée dans la fonction publique Camerounaise était réservée aux « protégés [proches]» de la « Génération privilégiée ».

Toutefois, cette action ne sera profitable pour le Cameroun en termes d’impacts positifs sur la paix sociale que si elle s’intègre dans le cadre d’une politique de rupture globale. Comme le montre Kakdeu (2010), toute politique publique qui manque d’harmonie génère des effets pervers. Puisque le citoyen Paul Biya est devenu l’opposant principal du régime Biya, il lui faut prendre d’autres mesures susceptibles de lui permettre d’inscrire résolument cette problématique de recrutement dans le cadre d’une politique globale de réconciliation avec la « Génération du Renouveau » dite « sacrifiée ».
Les actions simples d’animation consistent par exemple à accueillir les jeunes excellents à l’école et dans l’entreprenariat au Palais de l’Unité afin de rompre avec le cliché selon lequel ses banquets sont réservés aux Vieux fossoyeurs de la République. A l’égard de la diaspora, le Président Biya pourrait lancer une opération « retour au pays » qui soit une réelle politique publique d’intégration socioprofessionnelle au « pays d’origine ».


Sa politique d’emploi de la jeunesse est restée bornée aux sentiers battus et à l’intégration dans la fonction publique alors que l’Etat ne peut pas intégrer les 150 mille étudiants qui frappent aux portes du monde professionnel. Le Président de la République doit devenir la mascotte de l’entreprenariat. Il doit se donner la peine de faire la promotion des jeunes promoteurs de PME et GIC qui fondent les piliers de l’économie du pays. Ces secteurs peuvent employer tous les jeunes citoyens du pays.
Il est insolite par exemple de demander à la diaspora de revenir exercer au pays comme « agent de l’Etat » et dépendre du « code du travail » alors que cette dernière veut plutôt rentrer pour entreprendre. La vraie mesure adéquate serait donc de mettre sur pied des mesures incitatives pour faciliter l’investissement sur les plans douaniers, fiscaux, administratifs et financiers. Une telle politique publique serait plus efficace et plus efficiente pour promouvoir l’emploi pour tous à long terme. Mais, on fait plutôt face aux gens qui « attendent le jour du marché pour attacher leurs poules ». Cette façon de gérer le pays par des mesures ponctuelles présentera probablement ses limites.

Source :
http://www.lepost.fr/article/2011/03/19/2439402_generation-sacrifiee-vs-generation-privilegiee-la-logique-de-deux-lobbies-qui-s-affrontent-au-cameroun.html