lundi 22 décembre 2008

Dette odieuse, à qui profite la dette des pays du Sud?

Selon la doctrine juridique dite de la dette odieuse, une dette doit être considérée comme nulle dès lors qu’elle a été contractée sans le consentement de la population (régime despotique, transaction viciée par la corruption…) et sans qu’elle n’en bénéficie, dès lors que ces premiers éléments sont connus du prêteur.

Voir à ce sujet la brochure « Dette odieuse, à qui profite la dette des pays du Sud ? », de la Plate-forme Dette & Développement.

Voir aussi : www.detteodieuse.org
La dette odieuse, constitue un véritable roulot d'étranglement des pays du Sud et une surenchère pour les pays du Nord. C'est l'instrument pour assujéttir les pays dit "en voie de développement". Elle sappe de façon criminelle leur sursaut vers un avenir meilleur, et renforce la prédation des matières premières. Elle participe à un enrichissement illicite des mercantilistes eurocentristes et contribue à la consolidation des Paradis Fiscaux et Judicaires(P.F.J), privant ainsi les pays du Sud des ressources financières.
En 2004, pour un pays comme le Cameroun, uniquement 4% de son budget a servi au financement des projets sociaux de base tandis que 36% de son budget a servi au remboursement de la dette. La fuite des capitaux vers les P.F.J, via les multinationales occidentales en l'occurrence françaises, et les détournements des fonds publiques viennent accentuer cette hémorragie financière. La société civile est donc sommée de rembourser une dette dont elle n'a pas fait usage ni mandater les soi-disants dirigeant, de la contracter en son nom. Il y a donc un "marché de duppe" entre les roitelets nègres et les institutions internationales qui prennent en ôtage des millions de vies humaines. Les discours "vertueux" de ces institutions cachent leur intentions mafieuses. La criminalité économique est devenue, avec les Paradis Fisacaux et Judiciaire, un véritable défi pour la société civile des pays du Sud et celle du Nord, lesquelles sont victimes de la désinformation des médias du Nord qui sont pour la plupart tenus pa les plus grandes fortunes de la planète c'est-à-dire les principaux pourvoyeurs des P.F.J. Ceci situation entraîne une destruction de l'économie-monde, une amputation des biens publics à l'échelle mondiale.
Lors du discours de feu le Président du Burkina Faso, Thomas Sankara, le 29 juillet 1987 au sommet de l'Organisation de l'Unité Africaine (O.U.A) à Addis Abéba(capitale de l'Éthiopie), réagissant à la problématique de la dette, il déclare:

"[...] Nous estimons que la dette s'analyse d'abord de par ses origines. Les origines de la dette remontent aux origines du colonialisme. Ceux qui nous ont prêté de l'argent, ce sont ceux-là qui nous ont colonisés, ce sont les mêmes qui géraient nos États et nos économies, ce sont les colonisateurs qui endettaient l'Afrique auprès des bailleurs de fonds, leurs frères et cousins. Nous étions étrangers à cette dette, nous ne pouvons donc pas la payer.La dette, c'est encore le Néo-Colonialisme où les colonisateurs se sont transformés en assistants techniques ; en fait, nous devrions dire qu'ils se sont transformés en assassins techniques ; et ce sont eux qui nous ont proposé des sources de financement. Des bailleurs de fond, un terme que l'on emploie chaque jour comme s'il y avait des hommes dont le bâillement suffisait à créer le développement chez les autres. Ces bailleurs de fond nous ont été conseillés, recommandés ; On nous a présenté des montages financiers alléchants, des dossiers ; nous nous sommes endettés pour cinquante ans, soixante ans ,même plus c’est-à-dire que l'on nous a amenés à compromettre nos peuples pendant cinquante ans et plus. Mais la dette, c'est sa forme actuelle, contrôlée, dominée par l'impérialisme, une reconquête savamment organisée pour que l'Afrique, sa croissance, son développement obéisse à des paliers, à des normes qui nous sont totalement étrangères, faisant en sorte que chacun de nous devienne l'esclave financier c’est-à-dire l'esclave tout court de ceux qui ont eu l'opportunité, la ruse, la fourberie de placer les fonds chez nous avec l'obligation de rembourser. On nous dit de rembourser la dette, ce n'est pas une question morale, ce n'est point une question de ce prétendu honneur de rembourser ou de ne pas rembourser ; Monsieur le président, nous avons écouté et applaudi le premier ministre de Norvège lorsqu'elle est intervenue ici même, elle a dit, elle qui est Européenne, que toute la dette ne peut pas être remboursée. La dette ne peut pas être remboursée parce que d'abord si nous ne payons pas, nos bailleurs de fond ne mourront pas. Soyons-en sûrs. Par contre, si nous payons, c'est nous qui allons mourir. Soyons en sûrs également. Ceux qui nous ont conduits à l'endettement ont joué comme dans un casino ; quand ils gagnaient, il n'y avait point de débat, maintenant qu'ils ont perdu au jeu, ils nous exigent le remboursement ; et l'on parle de crise.
Non ! Monsieur le Président, ils ont joué, ils ont perdu, c'est la règle du jeu, la vie continue !

Nous ne pouvons pas rembourser la dette parce que nous n'avons pas de quoi payer ;
nous ne pouvons pas rembourser la dette parce que nous ne sommes pas responsables de la dette ;
nous ne pouvons pas payer la dette parce que, au contraire, les autres nous doivent ce que les plus grandes richesses ne pourront jamais payer c’est-à-dire la dette de sang. C'est notre sang qui a été versé ;
on parle du plan Marshall qui a refait l' Europe Économique mais ne parle jamais du plan Africain qui a permis à l'Europe de faire face aux hordes hitlériennes lorsque leur économie était menacée, leur stabilité était menacée.
Qui a sauvé l'Europe ? C'est l'Afrique !
On en parle très peu, on en parle si peu que nous ne pouvons pas nous être complices de ce silence ingrat. Si les autres ne peuvent pas Chanter nos louanges, nous avons au moins le devoir de dire que nos pères furent courageux et que nos anciens combattants ont sauvé l'Europe et finalement ont permis au monde de se débarrasser du Nazisme.
La dette, c'est aussi la conséquence des affrontements et lorsque l'on nous parle aujourd'hui de crise économique, on oublie de nous dire que la crise n'est pas venue de façon subite, la crise existe de tout temps et elle ira en s'aggravant chaque fois que les masses populaires seront de plus en plus conscientes de leur droit face aux exploiteurs.
Il y a crise aujourd'hui parce que les masses refusent que les richesses soient concentrées entre les mains de quelques individus ; Il y a crise parce que quelques individus déposent dans des banques à l'étranger des sommes colossales qui suffiraient à développer l' Afrique ;
Il y a crise parce que face à richesses individuelles que l'on peut nommer, les masses populaires refusent de vivre dans les ghettos, dans les bas quartiers ;
Il y a crise parce que les peuples partout refusent d'être dans Soweto face à Johannesburg.
Il y a donc lutte et l'exacerbation de cette lutte amène les tenants du pouvoir financier à s'inquiéter. On nous demande aujourd'hui d'être complices de la recherche d'un équilibre, équilibre en faveur des tenants du pouvoir financier, équilibre au détriment de nos masses populaires.
Non, nous ne pouvons pas être complices, non, nous ne pouvons pas accompagner ceux qui sucent le sang de nos peuples et qui vivent de la sueur de nos peuples, nous ne pouvons pas les accompagner dans leur démarche assassine.

Monsieur le président,
nous entendons parler de club, club de Rome, club de Paris, club de partout. Nous entendons parler du groupe des cinq, du groupe des sept, du groupe des dix peut être du groupe des cent et que sais-je encore. Il est normal que nous créions notre club et notre groupe faisant en sorte que dès aujourd'hui Addis Abeba devienne également le siège, le centre d'où partira le souffle nouveau : le club d'Addis Abeba.

Nous avons le devoir aujourd'hui de créer le front uni d'Addis Abeba contre la dette. Ce n'est que de cette façon que nous pouvons dire aux autres qu'en refusant de payer la dette nous ne venons pas dans une démarche belliqueuse, au contraire, c'est dans une démarche fraternelle pour dire ce qui est. Du reste, les masses populaires en Europe ne sont pas opposées aux masses populaires en Afrique mais ceux qui veulent exploiter l'Afrique, ce sont les mêmes qui exploitent l'Europe ;
Nous avons un ennemi commun. Donc notre club parti d'Addis Abeba devra également dire aux uns et aux autres que la dette ne saurait être payée. Et quand nous disons que la dette ne saurait être payée ce n'est point que nous sommes contre la morale, la dignité, le respect de la parole. Parce que nous estimons que nous n'avons pas la même morale que les autres. Entre le riche et le pauvre, il n'y a pas la même morale.
La bible, le coran, ne peuvent pas servir de la même manière celui qui exploite le peuple et celui qui est exploité ; Il faudrait alors qu'il y ait deux éditions de la bible et deux éditions du coran.

Nous ne pouvons pas accepter qu'on nous parle de dignité, nous ne pouvons pas accepter que l'on nous parle de mérite de ceux qui payent et de perte de confiance vis à vis de ceux qui ne payeraient pas. Nous devons au contraire dire que c'est normal aujourd'hui, nous devons au contraire reconnaître que les plus grands voleurs sont les plus riches.
Un pauvre, quand il vole, il ne commet qu'un larcin ou une peccadille tout jute pour survivre par nécessité. Les riches ce sont eux qui volent le fisc, les douanes et qui exploitent les peuples.

Monsieur le président,
ma proposition ne vise pas simplement à provoquer ou à faire du spectacle, je voudrais dire ce que chacun de nous pense et souhaite. Qui ici ne souhaite pas que la dette soit purement et simplement effacée ?
Celui qui ne le souhaite pas, il peut sortir, prendre son avion et aller tout de suite à la banque mondiale payer ! Tous nous le souhaitons !

Je ne voudrais pas que l'on prenne la proposition du Burkina Faso comme celle qui viendrait de la part de jeunes sans maturité et sans expérience.
Je ne voudrais pas non plus que l'on pense qu'il n'y a que les révolutionnaires à parler de cette façon.
Je voudrais que l'on admette que c'est simplement l'objectivité et l'obligation et je peux citer dans les exemples de ceux qui ont dit de ne pas payer la dette des révolutionnaires comme des non révolutionnaires, des jeunes comme des vieux. Je citerai par exemple Fidel Castro, il n'a pas mon âge même s'il est révolutionnaire mais je pourrais citer également François Mitterrand qui a dit que les pays africains ne peuvent pas payer, que les pays pauvres ne peuvent pas ;
Je pourrais citer Madame le premier ministre de Norvège, je ne connais pas son âge et je m'en voudrais de le lui demander. Je voudrais citer également le président Félix Houphouët-Boigny.

Si le Burkina Faso tout seul refuse de payer la dette, je ne serai pas là à la prochaine conférence. [...]" (1)
Le 15 octobre 1987, soit deux mois après la prononciation de ce discours, il est assassiné lors d'un coup d'état militaire.
Le Commité d'Annulation de la Dette du Tiersmonde (C.A.D.T.M), estime que:

"Les pays riches sont loin d’être étrangers à l’accumulation d’une dette colossale par les pays du Sud. Ils portent la lourde responsabilité d’une politique de prêts incontrôlée, répondant davantage à des intérêts économiques, politiques et personnels qu’à une politique de coopération au service du développement. Or, seules les populations des pays débiteurs en assument le coût, au prix de millions de vies humaines : le remboursement de la dette prive en effet les pays de ressources nécessaires au financement des secteurs sociaux essentiels. Annuler la dette des pays du Sud est donc un acte de justice. Au-delà, une solution de long terme exige un rééquilibrage des rapports de force dans la gestion internationale de la dette." (2)


Les créanciers du Club de Paris sont convenus le 24 janvier 2001 avec le Gouvernement de la République du Cameroun d’un accord de rééchelonnement de sa dette publique extérieure:
" Compte tenu des importantes réformes déjà mises en œuvre et de la charge de sa dette extérieure, le Cameroun a atteint en octobre 2000 le point de décision de l’initiative PPTE. Cet accord en Club de Paris fait également suite à l’approbation le 21 décembre 2000 par le Fonds Monétaire International d’une facilité pour la réduction de la pauvreté et la croissance. Cet accord consolide environ 1,3 milliards de dollars. Ce montant consiste en 0,2 milliard de dollars d’arriérés au 31 décembre 2000 et en 1,1 milliard de dollars d’échéances en principal et en intérêts dues entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2003 (dont environ 17 % au titre des prêts d’APD). Cet accord a été conclu selon les termes dits de « Cologne » élaborés par les créanciers du Club de Paris en vue de la mise en œuvre de l’initiative PPTE : les prêts d’APD doivent être remboursés sur 40 ans, dont 16 ans de grâce, à un taux d’intérêt au moins aussi favorable que le taux concessionnel de ces prêts ; les échéances sur les crédits commerciaux dues après le point de décision sont traitées de manière à obtenir un taux de réduction de 90 % en prenant en compte les réductions déjà mises en œuvre par le Club de Paris ; les montants restants sont rééchelonnés sur 23 ans dont 6 ans de grâce à un taux d’intérêt de marché (voir table jointe). Ce traitement intérimaire va conduire à l’annulation immédiate par les créanciers du Club de Paris d’environ 0,9 milliard de dollars sur la dette extérieure du Cameroun, comme prévu dans le cadre de l’initiative PTTE renforcée. Ces mesures réduisent le service de la dette due aux créanciers du Club de Paris entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2003 de 1,25 à 0,25 milliards de dollars. Les montants restants correspondent aux intérêts sur les montants rééchelonnés et aux échéances sur la dette contractée après la date butoir. Le Cameroun s’est engagé à affecter les ressources provenant du traitement exceptionnel de sa dette aux objectifs prioritaires identifiés dans sa stratégie de réduction de la pauvreté. Les pays créanciers ont indiqué leur disponibilité à réduire le stock de la dette du Cameroun dès qu’il franchira le point d’achèvement de l’initiative PPTE renforcée.

Notes de contexte:

1. Le Club de Paris s'est réuni pour la première fois en 1956. Il s'agit d'un groupe informel de
gouvernements créanciers des pays industrialisés. Il se réunit mensuellement à Paris avec des pays débiteurs afin de convenir avec eux d'une restructuration de leur dette.

2. Les membres du Club de Paris qui ont participé au réaménagement de la dette du Cameroun
étaient les représentants des gouvernements de l'Allemagne, de l’Autriche, de la Belgique, du Canada, du Danemark, des Etats-Unis, de la France, de l'Italie, du Japon, des Pays-Bas, du Royaume-Uni, de la Suède et de la Suisse. Les observateurs à cette réunion étaient des représentants des gouvernements de l’Espagne et de la Fédération de Russie, ainsi que du Fonds Monétaire International, de l’Association Internationale pour le Développement, et du Secrétariat de la C.N.U.C.E.D de l'Organisation de Coopération et de Développement Economique et de la Commission Européenne. La délégation de la République du Cameroun était conduite par M. Edouard AKAME MFOUMOU, Ministre d’Etat, chargé de l’Economie et des Finances. La réunion était présidée par Madame Stéphane PALLEZ, Chef du Service des Affaires Internationales à la Direction du Trésor français au Ministère de l’Economie, des Finances et de l'Industrie, Co-Présidente du Club de Paris.

Notes techniques:

1. La facilité pour la réduction de la pauvreté et la croissance conclue par le Cameroun avec le
Fonds Monétaire International a été approuvée par le Conseil d'Administration du Fonds le 21 décembre 2000.
La République du Cameroun a atteint le point de décision de l’initiative renforcée sur la dette des
pays pauvres très endettés en octobre 2000.

2. Le stock total de la dette publique du Cameroun était d’environ 7,8 milliards de dollars au 30 juin 1999. Le stock de la dette due aux créanciers du Club de Paris était estimé à 5,4 milliards de dollars dont 4,1 milliards de dollars de dette pré-date butoir (dont 20 % de dette d’aide publique au développement) et 1,3 milliard de dollars de dette post date butoir (source : rapport FMI du 19 septembre 2000 publié sur le site Internet du FMI http://www.inf.org/). La date butoir (31 décembre 1988 pour le Cameroun) est utilisée par les créanciers du Club de Paris pour les besoins internes des accords en Club de Paris. Lorsqu’un pays débiteur rencontre pour la première fois les créanciers du Club de Paris, une « date butoir » est définie et elle n’est pas modifiée lors des traitements ultérieurs en Club de Paris et les crédits accordés après cette date butoir ne peuvent pas faire l’objet d’un rééchelonnement. Ainsi, la date butoir permet de restaurer l’accès au crédit de ces pays débiteurs.

3.Les taux d’intérêts à appliquer au rééchelonnement doivent être négociés par le gouvernement de la République Camerounaise dans les accords bilatéraux de mise en œuvre de l’accord en Club de Paris. Les prêts d’APD seront rééchelonnés à un taux concessionnel inférieur au taux des contrats d’origine. Les autres contrats seront rééchelonnés à un taux de marché (appelé « taux approprié de marché »), défini sur la base du taux sans risque pour la monnaie considérée, plus une marge correspondant au coût de gestion.

4. Comme dans tout accord du Club de Paris, le Cameroun s’est engagé à rechercher un
traitement comparable de la part de ses créanciers non membres du Club de Paris. Au cas présent, l’application d’un traitement comparable impliquera une contribution équivalente des créanciers bilatéraux non membres du Club de Paris et de ses créanciers commerciaux, représentés par le Club de Londres. La délégation camerounaise a indiqué sa volonté de rencontrer ces créanciers dans le meilleur délai afin de négocier les termes d’un futur rééchelonnement. " (3,4)
Mais en réalité, qui gouverne le monde? (5, 6)


4.http://www.clubdeparis.org/sections/services/communiques/cameroun/downloadFile/PDF/CM24012001CPFR.pdf?nocache=1175506474.25

3.http://www.clubdeparis.org/sections/traitements/cameroun-20010124/downloadFile/ProfiDeRemboursement/cm24012001prfr.pdf

2. http://www.dette2000.org/data/File/DetteOdieuse.pdf

1. http://www.seneweb.com/videos/video/66.php

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